Le temple inaccessible

"Lorsque le sage pointe la montagne, l'idiot regarde le doigt". C'est un peu par cette maxime que je résumerai notre périple Royal Enfieldien de ce dimanche après-midi. Les lecteurs à carte platinium de ce blog savent déjà par la lecture de précédentes bafouilles que cette journée est souvent celle d'une ballade photographique dans les recoins de méga-city. Pour ne pas perturber les bonnes habitudes, Christelle m'accompagne sans l'ombre d'une hésitation, malgré une selle de moto à la fâcheuse tendance fugueuse, et l'absence cruelle d'un casque depuis son kidnapping la semaine dernière.
Au programme des réjouissances, la visite d'un temple aperçu par votre serviteur lors d'une virée dans le nord de la cité, entre Juhu et Andheri. Ce lieu de culte est sis curieusement sur une falaise, en plein milieu de la ville. A l'origine, il y avait une colline. Sous la pression immobilière, les bulldozers ont creusé le monticule pour ne laisser que le temple au sommet d'une falaise désormais abrupte. Vu du plancher des vaches, l'endroit semble surgit du sol tel un champignon.
Nous arrivons facilement à portée de regard de notre destination. C'est là que tout se complique, car l'endroit ne figure sur aucune carte et la signalisation routière est aussi précise que mes calculs de statistiques au baccalauréat.
Nous entamons alors une recherche à l'instinct du chemin vers notre destination. Il faut avouer que nous avons bien visité toutes les artères routières aux alentours, sans pour autant trouver le sésame qui nous guiderait vers l'endroit tant désiré. De multiples questions à la population autochtone se résument par des explications sympathiques et souriantes, mais systématiquement contradictoires ou fantaisistes.
Finalement, sans trop savoir comment, nous nous retrouvons dans une ruelle glauque, au beau milieu d'un bidonville. Une foule dense se presse, la rue est un dépotoir sans nom... Je vous laisse imaginer les regards des badauds découvrant ces inconoclates étrangers que nous sommes. Il est évident que nous aurons du mal à nous fondre dans le décor. Il est de ces moments où l'on de se sent, mais alors pas du tout, à sa place. J'envisage un instant de faire demi-tour, mais la ruelle, en forte pente, est trop étroite. Il n'est pas question de s'arrêter au milieu de cette populace qui n'aspire maintenant qu'à prendre contact avec nous. Nous poursuivons donc notre route pour finir, par le plus grand des hasards, au pied de la falaise.
Moto garée, nous gravissons les marches sur les pas d'une petite fille qui nous précède. Nous découvrons alors un petit paradis local. Le temple est minuscule, placé au centre du plateau. Une vue à 360 degrés, nous permet un panorama extraordinaire sur la ville. De la mer d'Arabie, à Madh Island, jusqu'aux confins nord de la ville... nous découvrons Bombay comme jamais.
Nous savourons l'instant. Mumbai décidément cache ses merveilles. Il est évident que très peu d'étrangers ont jamais mis les pieds ici... mais pour ma part je n'hésiterai pas à revenir.